Le WEB 3.0 Kesako ?

Il parait qu’Internet est une trilogie…

La trilogie du Web...bientot sur vos laptops

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Introduction et origine

Le terme WEB 3.0 s’est fait entendre du grand public en 2021, mais son apparition date de 2014…trop tôt pour un buzz…

C’est Gavin Wood, un développeur renommé, anciennement membre fondateur d’Ethereum et maintenant responsable de la blockchain Polkadot qui a employé ce terme parmi les premiers. Il s’agissait pour lui de faire référence à « un écosystème en ligne décentralisée basée sur la blockchain ».

Depuis le mot est employé à toutes les sauces et il n’est pas toujours évident de faire le tri entre hype et réalité.

Concepts

Derrière tout buzz marketing, il y’a toujours un semblant de vérité, et d’après ce que j’ai pu lire par-ci et là, le WEB 3.0 peut se définir selon 2 approches :

  • Idéologique
  • Le WEB 3.0 est une évolution de l’internet actuelle dans lequel l’information et les données y circulant ne sont dépendantes d’aucune structure centralisée et d’aucun service assuré par une entreprise spécifique. Les utilisateurs sont pleinement responsables de leurs informations personnelles et ces dernières ne pourraient être exploitées sans un consentement explicite (et potentiellement rémunéré). Il s’agit également d’amener les notions de propriétés aux actifs numériques et de renforcer le lien entre monde numérique et monde réel.

  • Technologique
  • Le WEB 3.0 est un assemblage de nouveaux protocoles, tirant parti des évolutions informatiques plus ou moins récentes, notamment autour de la blockchain (mais pas que) et de la cryptographie. L’objectif est d’améliorer la décentralisation, la gestion de l’identité et de la propriété sur Internet.

    Détails

    WEB 1.0 et WEB 2.0

    Pour identifier le WEB 3.0 essayons déjà de décrire le WEB 1.0 et le WEB 2.0

    Le WEB 1.0 : c’est l’information à sens unique. La donnée est mise à disposition sur un serveur puis consultée par un tiers sans possibilités d’interaction. Les protocoles mis en œuvre pour cela sont toujours d’actualité et sont restés libres d’implémentation comme TCP/UDP, HTTP…..Le WEB 1.0 se voulait ouvert et accessible au plus grand nombre afin de partager l’information et la diffuser. Sa technologie est toujours à l’œuvre aujourd’hui.

    Le WEB 2.0 : les protocoles du WEB 1.0 ont été poursuivis et incrémentés pour permettre cette fois-ci une circulation de l’information dans les 2 sens avec la mise en place de contenu dynamique. Des acteurs se sont positionnés, capitalisant sur ces protocoles pour construire des services maintenus sur des serveurs privés et rendus accessibles soit gratuitement (sur le papier seulement) soit contre rémunération. C’est la naissance des réseaux sociaux et des applications webs ou l’utilisateur peut non seulement consulter de la donnée, mais également en transmettre, ou modifier du contenu.

    Le WEB 3.0 est censé devenir une itération du WEB 2.0, conservant les mêmes usages, mais avec un traitement différent. Les protocoles d’origine du web sont toujours d’actualité et n’ont jamais nécessité autre chose que des compétences techniques pour les implémenter. Personne ne paye de royalties à une entreprise spécifique pour implémenter SMTP par exemple, alors que celui-ci est toujours à la base du transfert de mail. Pourtant, hormis cas particulier, nous dépendons majoritairement de géants du web pour nos boites mail : GMAIL, Office365…car ce sont eux qui ont construit les outils autour de ces protocoles pour nous fournir un service. Ce modèle bien que pratique connait aujourd’hui ses limites, car le web est devenu dépendant de ces services et donc de ces entreprises. Pire, s’il est toujours possible d’implémenter un protocole comme SMTP pour émettre des mails depuis son propre serveur et échanger avec d’autres serveurs privés, c’est presque impossible d’émettre vers des boites GMAIL ou autres grands services si vous n’êtes pas whitelisté par ces derniers.

    S’il est devenu simple d’émettre de la donnée, il est devenu complexe de la suivre et d’en garder le contrôle. Le côté ouvert et libre du WEB 1.0 n’est plus…pour certains le WEB 3.0 est censé corriger cela en donnant accès à des services décentralisés évoluant en parallèle des services classiques. Il n’a pas vocation à remplacer le WEB 2.0, mais à étendre ses capacités et à redonner le contrôle sur ses données et sa vie privée.

    Le 1,2 et le 3

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    Concrètement

    Cela revient à construire des applications s’exécutant sur des nœuds d’un réseau dont les membres appartiennent à des entités différentes, exécutant un code ouvert et libre de droits. Il peut y’avoir plusieurs réseaux, spécialisés ou non, avec des ponts potentiels entre ces derniers si nécessaires. L’authentification au sein de ces réseaux se fait via une combinaison clef privée/clef publique, rendant caduque le classique login mot de passe, permettant de se passer des informations personnelles si elles ne sont pas nécessaires.

    Pour faire plus simple : plusieurs blockchains interconnectées entre elles servent à la fois à l’hébergement des données et à l’exécution des tâches. Les réseaux sociaux pourraient ainsi être toujours présents, mais totalement décorrélés d’une société spécifique. L’exécution d’un nœud par un acteur est encouragée par des gains sous forme de token, prenant de la valeur en parallèle de l’usage du réseau. Ces mêmes token peuvent également servir à mettre en place une gouvernance pour décider de la roadmap du projet, chaque possesseur de token pouvant proposer des évolutions et participer au vote des fonctionnalités à implémenter.

    En gros, le WEB3.0 est l’implémentation des notions aujourd’hui émergentes autour de la blockchain et de la cryptomonnaie: décentralisation, tokenomics, DAO (Decentralized Autonomous, Organization)…

    Le WEB 3.0

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    On commence même à voir se dégager des logiques de « layer ». Si certains sont familiers avec le modèle OSI pour décrire le fonctionnement d’un réseau information, je ne peux m’empêcher d’y trouver un écho dans ce que l’on voit apparaitre aujourd’hui sur le web 3.0.

    En effet, dans le meilleur des mondes, il faudrait pouvoir compter sur des réseaux à la fois décentralisé, sécurisé et scalable. Or il est très difficile (voir impossible) d’implémenter ces trois constantes avec le même niveau de performance. Améliorer l’un signifie diminuer les deux autres. On appelle ça le trilemme des blockchains.

    Le trilemme des blockchains

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    Pour tenter de remédier à cette problématique, le web 3.0 est en train d’adopter une démarche modulaire basée sur l’empilement de couches…comme le modèle OSI.

    On trouve désormais des réseaux « Layer 0 » comme Polkadot ou Cosmos, chargé d’interconnecter des réseaux de la couche supérieure entre eux. Le focus est mis sur la décentralisation et la sécurité, sans spécialisation particulière. On y développe des protocoles d’échanges implémentables librement et adoptable par des blockchains évoluant au-dessus.

    Puis viens les layers 1, comme Ethereum, Solana, Cardano et BitCoin. C’est la couche la plus développée aujourd’hui, car historiquement la première sur le marché. Fonction de la blockchain, on peut trouver des fonctionnalités plus ou moins évoluées. Bitcoin reste focalisé sur le transfert de valeur par exemple, la ou Ethereum apporte de la programmabilité pour l’exécution de code plus évolué (les fameux Smart Contrat). Mais dans l’ensemble, on reste sur des priorités focalisés sur la sécurité et la décentralisation

    Les layers 2 sont arrivés plus récemment, en particulier sur Ethereum. De plusieurs types et mêlant différents mécanismes, on n’est déjà sur des réseaux bien plus centralisé, mais souvent plus performant avec d’importante vitesse de transaction et surtout un coup d’usage beaucoup plus faible. En effet, exécuter du code et surtout stocker des données dans les réseaux de layer 1 sont de plus en plus cher à fur à mesure que le réseau est utilisé. Les mécanismes de synchronisation d’un grand nombre de nodes sur la planète, garantissant une très forte disponibilité de l’information et une résistance aux attaques, est complexe…Donc cher. Les layer 2 permettent d’agréger un grand nombre de transactions et de compresser l’information avant de l’envoyer à destination des réseaux de niveau 1. Il y’a donc davantage de risque au départ, une résilience plus faible et un risque de censure au départ, mais une fois la donnée enregistrée sur les layer 1, on retrouve à nouveau les avantages de ces dernières.

    Les layer 3 sont encore naissantes, on parle de réseaux très spécialisés pour opérer un type d’action. Traiter les informations d’un jeu vidéo, faire tourner des mécanismes propres à une application. C’est la performance et le cout qui prime, puis a fur à mesure du temps, les données redescendent dans les couches…ou pas fonction des souhaits des développeurs et du besoin de base.

    À noter que certains projets comme Solana, continuer de miser sur une approche basée sur un layer 1 uniquement. Partant du principe qu’il reste possible technologiquement de construire une blockchain qui puissent être bonne partout.

    Logique modulaire de couche

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    Forces et Faiblesses

    Sur le papier c’est prometteur, dans les faits, ça reste compliqué.

    La centralisation n’a pas que du mauvais : c’est rassurant pour certains, c’est techniquement plus simple à implémenter et plus performant (plus vous décentralisez, plus vous avez de nœuds, plus il devient compliqué et long de mettre tout le monde d’accord). C’est plus simple également à réglementer. En effet, c’est bien l’anonymat et l’usage de réseaux n’appartenant à personne…mais à qui se plaindre quand les choses déraillent ou que certains profitent de la découverte de failles dans les protocoles mises en œuvre pour voler des données ou compromettre un réseau.

    La sécurité est aussi un enjeu majeur autour d’internet, et le WEB3.0 fait appelle certains principes et technologies encore jeunes ou l’on manque de recul sur ce sujet.

    Le WEB 3.0 ,si conceptuellement parlant est assez décrit, il est loin d’être mature à la date d’écriture de cet article.

    Son usage reste encore complexe et nécessite d’évoluer techniquement. L’usage de couche permet certes de commencer à fournir une solution au trilemme de la blockchain, mais amène une expérience utilisateur aujourd’hui très pénalisante (d’où la persévérance de certains projets comme Solana à rester sur une logique layer 1).

    L’explosion des réseaux de toute sorte, le mélange des projets sérieux et prometteurs avec les projets bullshit, profitant de la vague comme à l’époque de la bulle internet rendent compliqué de savoir ce qui va rester et ce qui va disparaitre. Qui se souvient aujourd’hui des fournisseurs d’accès internet comme Tiscali, AOL, Club Internet, Alice, ou des services comme MSN, Caramail, Yahoo, Lycos….Il est fort probable que le WEB 3.0 ai encore à connaitre un gros nettoyage avant de réellement se montrer pertinent.

    Il demeure également un risque fort de voir le WEB 3.0 donner lieu à d’autres géants du web, ou que ceux déjà en place s’en accaparent. Si 500 serveurs participent à un projet, mais que ces 500 appartiennent tous à la même entité, directement ou indirectement, autant rester sur un modèle classique. Certaines blockchains se vantent d’avoir plus de 1000 serveurs administrés par autant de personnes différentes…Mais quand on creuse on s’aperçoit que 90 % de ces nodes s’exécutent chez AWS ou chez un autre fournisseur de cloud public… qui peut décider du jour au lendemain de mettre fin aux instances…

    De même si une gouvernance par token implique que celui qui a le plus de token a le plus de pouvoir décisionnaire sur le projet, on revient à une centralisation des décisions.

    Par contre, il est fort à parier que le WEB 2.0 peut, au fil des années connaitre des évolutions du WEB 3.0, ou un NFT ne serait pas qu’un JPEG vendu beaucoup trop cher, mais par exemple une version numérique d’un diplôme dont on pourrait s’assurer de l’organisme émetteur, qui serait rattaché uniquement au possesseur d’une clef privée et qui pourrait être directement consultée par des sites d’emploi pour s’assurer de la validité du CV d’un candidat.

    Imaginer une école reconnue émettre la preuve de réussite à un examen via un NFT, soit une preuve cryptographique infalsifiable rattaché uniquement à la clef privée de chaque étudiant. Chaque élève ayant reçu le NFT pourrait l’indiquer sur un site du WEB 2.0 comme LinkedIn, ce dernier via consultation de la blockchain pourrait vérifier que l’émission du NFT a bien été fait par l’adresse public rattaché à l’école et ainsi s’assurer que la personne a bien réussi son examen.

    S’authentifier dans un jeu pourrait se faire directement avec l’équivalent d’un « Wallet », soit avec la clef privée de l’utilisateur qui pourrait voir stocker son inventaire et son parcours dans les niveaux dans une blockchain publique, facilitant ainsi la lutte contre la triche et pourquoi pas l’interaction avec d’autres jeux ou l’accès à des activités/objets dans le monde réel. (Gagner un objet virtuel pourrait permettre par exemple de gagner un objet dans la vraie vie)

    Si les mécanismes de clef privée/ clef publique associés aux seedphrase propre aux blockchains reste complexes pour certains, des alternatives arrivent comme l’account abstraction permettant de revenir à des mécanismes d’authentification plus classique tout en bénéficiant d’une interaction avec les réseaux WEB 3.0.

    Conclusions

    Si le WEB3.0 est avant tout un buzz marketing permettant à de nombreux projets d’essayer de vendre leur innovation, il n’en demeure pas moins que le WEB que nous connaissons aujourd’hui est amené à évoluer comme il l’a toujours fait. Le numérique fait partie intégrante de nos vies et ce n’est pas sans poser quelques soucis autour de la sécurité et de l’usage de nos données. Il devient nécessaire d’apporter la notion de rareté et de propriété dans le numérique pour aller au bout de la digitalisation opérée depuis plusieurs années maintenant.

    On cherche à reproduire certains principes de nos vies réelles dans le virtuel comme la notion de propriété, de transmission, de vie privée…Le WEB 3.0 est censé aider à cela, maintenant rien n’est encore sec et tout peut encore changer ! Mais je reste intimement persuadé que derrière le mont « BullShit » se cache des vraies innovations. Il n’est pas impossible que certains développeurs de génie soient en train de construire aujourd’hui les standards du web de demain !



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